vendredi 28 février 2014

Metzger sort de son trou

Metzger sort de son trou est un roman de l'autrichien Thomas Raab publié par Carnets Nord.

Présentation de l'éditeur :
Willibald Adrian Metzger, restaurateur de meubles anciens, n’a pas vraiment le profil du héros. Il ne boit pas de café, s’évanouit  quand il sent de la fumée de cigarette, n’a ni voiture ni téléphone portable et a un faible pour les femmes plus âgées. Moqué pour son nom de famille (le « charcutier ») et pour sa timidité, il traverse la vie pour ainsi dire enfermé dans son atelier avec sa bouteille de rouge. Pourtant lorsqu’en traversant un parc enneigé, il tombe sur le cadavre d’un homme éborgné, le pacifique Willibald n’a d’autre choix que de se mettre à enquêter, d’autant que la victime ne lui est pas inconnue : Felix Dobermann, son bourreau du temps de la cour de récré. 

Mais le cadavre disparaît comme par enchantement, la police devient suspicieuse, et les indices apparaissent mystérieusement autour de Metzger… Willibald « le charcutier » va devoir mettre les mains dans le cambouis et retourner sur les bancs de l’école pour élucider ce meurtre – et, en passant, retrouver son premier béguin, Danjela, une Croate experte en crochetage de serrures, concierge de profession, flanquée de son chien Edgar et dotée d’un accent à couper au couteau.

Avec ce premier opus sur les tribulations de Metzger, Thomas Raab nous plonge dans l’Autriche profonde et nous présente un héros incroyablement attachant : bourru, solitaire, vieux jeu, collectionnant ses souvenirs dans des boîtes à chaussures et citant à tout bout de champ les maximes de ses parents disparus.

S'il n'était pas tombé par hasard sur le corps inanimé d'un ancien camarade de lycée, au nom canin, il ne serait sans doute jamais sorti de son quotidien qui se résume à la restauration de meubles anciens et des culots de bouteilles qu'il vide à longueur de journée. Célibataire endurci, il se renferme de plus en plus sur son monde où une quelconque cohabitation semble impossible. Un monde de meubles anciens dont la façon qu'ont les gens de les traiter est une métaphore du paysage social.

Lorsque Dobermann aux dents aiguisées ressurgit dans sa vie, ce n'est pas, pour cette fois, le martyriser mais pour l'embarquer dans une drôle d'enquête se rapportant à l'époque du lycée. Époque pour laquelle il ne garde pas un très bon souvenir puisqu'il était le souffre-douleur de certains de ses camarades.
Mais Willibald se sent pousser des ailes et trouve le courage d'affronter à nouveau ses anciens détracteurs pour élucider cette enquête. Qui a tué Dobermann et pourquoi ? Pour cela il devra interroger de nombreuses et anciennes connaissances qui pourraient lui révéler bien des choses sur certaines affaires du passé qui auraient un lien avec le récent disparu.

Devenu détective sur le tas, Metzger semble peu à peu se complaire dans ce rôle qui le sociabilise, il paraît se sentir plus à l'aise, et moins saoul, en compagnie d'autres personnes. Moins sauvage.
L'auteur fait de son histoire une sorte de conte où son héros à la limite de la déchéance humaine se retrouvera petit à petit sur les devants de la scène. Mais la jolie Cendrillon fait place à une Danjela aux charmes discutables et le monde enchanté dégage une odeur de crime. Le jeune prince au litron en devient l'anti-héros parfait, celui qui imposera la justice malgré lui. Un personnage terriblement attachant dont on aime se moquer, notre souffre-douleur à nous aussi pour lequel on vit une relation passionnelle entre amour et haine.

A l'image d'Heinrich Steinfest édité en France également par Carnets Nord, Thomas Raab surprend par son style totalement décalé ; à la fois noir et très drôle. Le roman noir autrichien se porte bien et Thomas Raab le confirme. Déjà six aventures du personnage courent en Autriche alors que le premier tome est sorti il y a peu en France. Vivement que Carnets Nord nous les édite tous !

lundi 24 février 2014

Le Moine de Képhas

Le moine de Képhas est un roman d'espionnage de Stephano Brasi et Henri Boschetti.

Présentation de l'éditeur :
Eté 2014, une raffinerie du Rhône est la cible d’un attentat terroriste méticuleusement organisé. Une seule victime mais tout le site est ravagé. Les services du Ministère de l’intérieur sont mis en alerte maximale mais les pistes sont inexistantes. Jusqu’à ce que la revendication tombe : on demande la libération d’un certain nombre de prisonniers djihadistes détenus dans les prisons françaises. Pour entrer en contact avec les commanditaires, ni la DCRI ni la DGSE n’ont les relais qu’il faut. Un seul interlocuteur peut établir le lien mais c’est un partenaire très inhabituel : le jeune Père Raphaël, officiellement détaché en France pour des études de théologie mais en réalité agent de renseignement pour les services du Vatican.
Commence alors une plongée dans les méandres secrets des réseaux de l’Église et une course contre la montre au bout de laquelle se dresse un ennemi sans pitié.

Henri Boschetti, nous raconte les Editions du Toucan, est le pseudonyme d'un ancien agent des services de renseignements français, plusieurs fois incarcéré lors de missions d'infiltration. Son expérience sur le terrain sert indéniablement le roman puisque certaines scènes nous font frémir par leur réalisme.
Dès le début du roman, le ton est donné : de l'action et encore de l'action ! S'ajoute à cela une véritable réflexion sur les tenants et les aboutissants de cette guerre sainte qui se prépare.

Comment peut-on en arriver là ? Des français bloqués, prisonniers chez eux par un couvre-feu. Une politique dure qui flirte un peu trop avec les grandes instances catholiques. Un imam extrémiste qui dirige toutes les opérations depuis une prison ... Al-Qaïda frappe fort cette fois puisque l'organisation terroriste arrive à joindre à sa cause et manipuler de nombreux musulmans français, en partie ceux situés dans les cités. J'ai un sérieux doute sur le réalisme de la chose et ose espérer qu'une infime minorité seulement est radicale et rêve d'une guerre sainte ...

Les services secrets du Vatican soutiennent le gouvernement français et offrent même les services de l'un de leurs meilleurs hommes sur le terrain. Commencent alors une guerre secrète sans merci entre les deux camps et une opération d'infiltration très mouvementée. Ceci sans compter sur les magouilles et astuces politiques pour mener à bien les missions tout en réalisant une chasse aux sorcières corrompues dans les services de renseignements français.

Le Moine de Képhas se veut réaliste en nous offrant une vision de ce qu'il pourrait subvenir dans un avenir proche. Le roman ne manque pas de rythme et se lit plutôt bien. Par contre, je n'ai pas accroché aux personnages, mise à part le personnage de Diéner qui peut intéresser par son esprit et son ingéniosité.

lundi 17 février 2014

Play

Play est un thriller de Franck Parisot paru en Janvier 2014 aux éditions Albin Michel.

Présentation de l'éditeur :
Il vous voit sans que vous ne le voyiez.

Pour tuer, torturer, mettre en scène vos derniers instants avant de les poster sur le Net, sa caméra est sa meilleure arme. Il lui suffit d’appuyer sur PLAY pour livrer le pire aux appétits voyeurs d’une civilisation qui ne vit que par procuration.

Un premier thriller implacable et virtuose.

Une fois la lecture achevée, j'ai eu un sentiment mitigé. Ce 'Se7en like' sent trop le réchauffé, une sorte de mixte de films d'horreur et de thrillers sortis ces dernières années. Bien entendu et fort heureusement, l'auteur invente un nouveau type de tueur aux plans maléfiques. Même si parfois cela peut sembler être tiré par les cheveux.

Le cyclope. Tueur intouchable qui a l’œil partout. Tueur sans merci qui n'épargne personne et est prêt à tout pour mettre son plan à exécution. Il joue avec les enquêteurs, les connait peut-être même mieux qu'ils ne se connaissent eux-mêmes et sait comment les toucher.
Les motivations du criminel doivent être réellement importantes pour les mises en scène très dures qu'il met en place. L'auteur use parfois du gore dans l'excès pour choquer le lecteur et nous livre d'ailleurs une scène presque écœurante que j'ai trouvée de trop. Si on fait abstraction de cette dernière, le reste est plutôt bien amené et rusé.

Tout est filmé. Big Devil Brother vous regarde et attend le bon moment pour s'emparer de vous dans le but que vous complétiez le terrifiant puzzle mis en place pour le détective Bridge.
Chaque morceau du texte est également un élément de ce puzzle pour le lecteur car tout a un sens. La fin vous donnera d'ailleurs la clé pour décoder l'ensemble. Je dois dire que l'auteur a bien travaillé son texte pour ne pas s'y perdre et rester cohérent jusqu'au bout tout en semant des indices tout du long sans jamais trop se découvrir.

Franck Parisot tente un thriller à l'américaine et réussit parfaitement son pari. Il sait entrainer le lecteur dans son histoire sans jamais le lâcher. Il maîtrise parfaitement les clés du genre et réalise un page-turner implacable. Si seulement ce roman était sorti au moins dix ans plus tôt, j'aurais été totalement conquis.

N'hésitez pas à lire un extrait du roman sur le site officiel d'Albin Michel pour vous faire une idée.

mardi 4 février 2014

Apnée noire

Apnée noire est le nouveau thriller de Claire Favan paru le 15 Janvier aux éditions du Toucan Noir.

Présentation de l'éditeur :
« Vêtue d’un pyjama en satin écru, la jeune femme repose dans une baignoire remplie, en position de fœtus inversé. Ses mains et ses chevilles sont étroitement liées derrière son dos et elle flotte encore avec un soupçon de grâce. » A Columbia, sur la côte est des Etats-Unis, c’est la scène macabre que découvre le lieutenant Sandino. Officier intègre, c’est aussi un homme brisé depuis la disparition de sa famille. Pour mener cette enquête, il doit collaborer avec Megan Halliwell, l’agent du FBI qui a permis l’année précédente l’arrestation de Vernon Chester, un tueur psychopathe qui vient d’être exécuté. Très vite pourtant, il apparaît que ce dernier meurtre présente des ressemblances troublantes avec les crimes commis par Chester. Comment est-ce possible ? Tandis que Megan n’ose imaginer le pire, une erreur judiciaire, Sandino se concentre sur certaines incohérences. De discordes en silences la relation des deux policiers évolue, alors que chaque jour le tueur semble se rapprocher d’eux, omniprésent et insaisissable… 

Le lieutenant Sandino n'est plus que l'ombre de lui-même depuis un braquage qui a mal tourné et qui lui a pris celles qu'il aimait. Le super flic d'antan n'est plus. Il carbure à présent à l'alcool et se réveille le matin dans sa voiture puisque trop saoul pour rejoindre son chez-soi.
Quel choc donc pour l'agent du FBI, Megan Halliwell, lorsqu'elle découvre son nouvel équipier pour se lancer dans une sombre et mystérieuse enquête qui ressemble en tout point à celle dont elle vient de conclure un an auparavant. Le meurtrier, Vernon Chester, a été condamné à mort et elle a assisté à sa fin.

Copycat ou esprit surnaturel ? Les idées s’amoncellent dans la tête des deux enquêteurs et les théories se multiplient quant à l'identité du tueur. Tandis que ce dernier sévit, Megan et Vince Sandino se méfient l'un de l'autre jusqu'au point de fouiller loin dans le passé de son équipier. Et le passé en cache bien des choses !

Les apparences sont trompeuses dans Apnée noire et l'auteur ne sait que trop bien en jouer. L'histoire est vraiment captivante. Le roman se lit bien et vite. Qu'il est difficile de refermer le livre tant on en redemande !
On pourrait penser à certains moments que l'auteur va jouer la carte de la facilité pour son dénouement, mais non, elle réussit avec brio à maitriser son intrigue tout au long du roman et nous tient en haleine du début jusqu'à la dernière page. Apnée noire est encore une très belle surprise de début d'année ! Un thriller qui va sans aucun doute faire parler de lui.