dimanche 30 août 2015

Quelque chose pour le week-end

Quelque chose pour le week-end est un roman de Sébastien Gendron paru en 2011 aux éditions Baleine.

Présentation de l'éditeur :
A Kirk Bay, en Angleterre, il ne s'était jamais rien passé, avant. Des centaines de kilos de bonne cocaïne s'échouent sur la plage. Suivis d'une armada de grands pingouins, d'une espèce qu'on pensait disparue.
Ces apparitions sont-elles liées ? Cela a-t-il un rapport ?
S'ensuit un blizzard de toxicomanie et une "pingouinphobie" mémorable, puis le chaos, la guerre.
Et pendant ce temps, un homme essaie de tuer sa femme.

C'est en un peu moins de 300 pages que l'auteur arrive à vous faire prendre conscience que toute situation absurde peut logiquement en entraîner de nombreuses autres toutes autant hallucinantes si elle est accompagnée de personnages fantasques et de quelques kilos de cocaïne. Sans oublier le retour de grands pingouins disparus depuis plus de cent ans.

Lawrence Paxton s'est-il trouvé au bon endroit au bon moment ou l'inverse ? Celui qui a découvert ces fameux alcidés sur une plage de Kirk Bay a vu sa vie totalement chamboulée après cette nuit là. C'est d'ailleurs cette nuit là qu'il décide de se débarrasser de celle qui partage sa vie depuis des décennies ; Lynn. Comment a t-il fait pour rester avec elle ? Elle qui semble être le portrait craché de Benny Hill lorsqu'il se déguisait en femme ... vous imaginez !? Non, ce n'est plus possible pour Lawrence. La décision est prise, il faut qu'il la tue.

Commence alors un enchaînement de scènes plus surprenantes les unes que les autres. Lawrence Paxton, citoyen apparemment modèle, commence à partir en vrille et fait resurgir un monstre psychopathe et calculateur qui ne demandait qu'à sortir. Pendant ce temps là les pingouins envahissent la ville. Ensuite, vient l'armée. Un bordel sans nom s'installe.

Quelque chose pour le week-end est un roman excellent qui se lit avec plaisir et surtout avec le sourire. L'auteur a sûrement raison dans ses dédicaces, il signe peut-être bien là "le plus grand roman anglais du 21e siècle entre Jane Austen et Benny Hill ...". Je n'aurais pas dit mieux !



"J'attends une vraie bonne occasion d'offrir des fleurs à ma femme. Son enterrement par exemple...
Benny Hill.

dimanche 23 août 2015

Ederlezi

Ederlezi est un roman de Velibor Colic publié aux éditions Gallimard en mai 2014.

Présentation de l'éditeur :
Ederlezi retrace l'histoire, à travers le XXe siècle, d'un fameux orchestre tzigane composé de musiciens virtuoses, buveurs, conteurs invétérés, séducteurs et bagarreurs incorrigibles. Ils colportent leurs blagues paillardes, leurs aphorismes douteux et leurs chansons lacrymogènes de village en village. L'orchestre sombrera dans les grands remous de l'histoire : englouti en 1943 dans un des camps d'extermination où périrent des milliers d'autres Tziganes, il renaîtra pour être de nouveau broyé par la guerre d'ex-Yougoslavie en 1993. Chaque fois, le meneur de l'orchestre, Azlan, semble se réincarner. On le retrouve finalement dans la «Jungle» de Calais en 2009, parmi les sans-papiers et les traîne-misère qui cherchent un destin aux franges de la modernité.
Le roman de Velibor Čolić restitue merveilleusement la folie de la musique tzigane, nourrie de mélopées yiddish, de sevdah bosniaque, de fanfares serbes ou autrichiennes, une musique et une écriture pleines d'insolence, au charme sinueux et imprévisible. Les réincarnations successives d'Azlan font vivre avec bonheur la figure du Rom errant éternellement, porté par un vent de musique et d'alcool, chargé des douleurs et des joies d'un peuple comparable à nul autre

Comme son titre l'indique, Ederlezi est une comédie pessimiste sur les tziganes à travers le XXe siècle. L'auteur de Les Bosniaques ou encore Archanges continue à retracer l'histoire du siècle dernier mais cette fois-ci au travers des yeux de musiciens tziganes et de leurs chants éplorés que l'on écoute avec plaisir et émotion tout au long du roman.

Avec Ederlezi, il rend hommage à ces nomades pourchassés et mal-aimés quelque soit l'époque. C'est au travers de plusieurs personnages dont chacun semble être la réincarnation du précédent qu'il nous fait voyager dans toute l'Europe ; les Azlan. Dotés d'une voix exceptionnelle, ils arrivent à partager toute la tristesse qui colle à la peau de leur peuple en chantonnant avec leur orchestre dans de nombreuses villes où ils se font souvent remarqués.

Avec toujours autant d'humour noir et de magie, Velibor Colic arrive une nouvelle fois à nous transporter à travers le temps et nous fait découvrir de nouveaux personnages au destin bien triste. Il sait trouver les mots justes pour nous faire ressentir toutes sortes d'émotions. Sa maîtrise de la langue française est d'ailleurs remarquable car, rappelons-le, le français n'est pas la langue maternelle de ce réfugié bosnien. Encore un excellent roman de Velibor Colic, je le conseille chaudement !

mercredi 12 août 2015

Les tribulations du dernier Sijilmassi

Les tribulations du dernier Sijilmassi est un roman de Fouad Laroui, l'auteur de l'excellent Une année chez les français, publié en août 2014 aux éditions Julliard.

Présentation de l'éditeur :
Un ingénieur marocain décide du jour au lendemain de rompre avec son mode de vie occidentalisé.
Une tentative de retour aux sources semée d'embûches et à l'issue plus qu'incertaine...

« Adam réfléchissait. Et il n'arrivait pas à trouver de solution à cette énigme : pourquoi son corps se trouvait-il à une altitude de trente mille pieds, propulsé à une vitesse supersonique par des réacteurs conçus du côté de Seattle ou de Toulouse – très loin de son Azemmour natal, ou les carrioles qui allaient au souk dépassaient rarement la célérité du mulet, ou les voitures à bras n'excédaient pas l'allure du gueux se traînant de déboires en contretemps ? »

Dans son style inimitable, Fouad Laroui nous entraîne à la suite de son héros – un ingénieur marocain décidé à rompre du jour au lendemain avec son mode de vie moderne et occidentalisé – dans une aventure échevelée et picaresque. Une tentative de retour aux sources semée d'embûches et à l'issue plus qu'incertaine, derrière laquelle se dessine une des grandes interrogations de notre temps : comment abattre les murs que l'ignorance et l'obscurantisme érigent entre les civilisations ?

Une fois de plus, Fouad Laroui nous emmène avec lui fouler le sol marocain à la rencontre de nouveaux personnages plus extravagants les uns que les autres. Des personnages obsédés par deux cultes qui règnent au Maroc et même ailleurs : l'Islam et l'argent. L'argent et l'embourgeoisement moqué par l'auteur dans quelques saynètes bien drôles. L'Islam, ses fanatiques irréfléchis et les illettrés qui s'abreuvent de leurs paroles. Avec tout cela, l'auteur démontre comment l'inculture et l'illettrisme peuvent profiter à certains et observe avec tristesse une peur voire une haine envers les cultures d'autres civilisations.

Tout commence lorsque Adam contemple son pays depuis un avion. Il commence alors à se poser des questions existentielles qui vont le conduire à revoir totalement son mode de vie. Il quitte son emploi très bien payé, sa femme qui l'aimait pour sa belle situation, et décide de partir sur la route sans trop savoir où ni pourquoi.
Chacun de ses actes, ou plutôt de ses non-actes, intriguent la population le voyant tantôt comme un fou, tantôt comme le messie. Ses réflexions mûrement réfléchies agacent. Son avis sur la religion et son intérêt pour la culture française dérangent clairement, à tel point que l'on assiste à des échanges de parole musclés mais très intéressants.

Fouad Laroui, comme à son habitude, utilise l'humour tout au long de son roman pour aborder des sujets sensibles au Maroc. Ses personnages sont fantastiques (et souvent fantasques). Comme certains d'entre eux, le lecteur se met à croire qu'Adam, le dernier des Sijilmassi, est une sorte de messie distillant la bonne parole en parcourant le chemin de sa vie et celui de son pays, de sa culture, tout en se posant les bonnes questions et en restant fidèle à sa croyance. Les tribulations du dernier Sijilmassi est une quête absolument fabuleuse, un pur moment de bonheur.

dimanche 9 août 2015

Dark Horse

Dark Horse est un roman de Craig Johnson paru le 21/05/2015 aux éditions Points.

Présentation de l'éditeur :
Comment Mary Barsad, si douce, a-t-elle pu abattre son mari de sang-froid ? Elle a tout avoué. Et les mobiles ne manquent pas : infidèle, magouilleur, il aurait peu avant sa mort enfermé les chevaux de course auxquels elle tenait tant dans sa grange, avant d’y mettre le feu. Mais le shérif Walt Longmire se méfie des évidences. À Absalom, Wyoming, il décide de mener sa propre enquête…

Il s'agit de ma première rencontre avec le shérif Walt Longmire et pour une première rencontre, on peut dire que ça déménage. Le shérif est un cow-boy des temps modernes. Craig Johnson redonne vie à ces héros que l'on admirait lorsque nous étions encore que des gosses. Flingue à la ceinture, il arpente les rues poussiéreuses à la recherche du coupable. Du bar miteux au ring de boxe, rien ne le fera reculer. Et le mieux dans tout cela, c'est que Walt Longmire est un gars totalement honnête et loyal qui donnerait sa vie pour la justice.

Le bureau du shérif reçoit une nouvelle détenue ; Mary Barsad. Accusée d'avoir tué son mari de plusieurs balles dans la tête, elle a avoué être l'auteur de ce crime. Mais Longmire flaire quelque chose de plus gros là-dessous. Il a des doutes et il est le genre de personne qui va jusqu'au bout pour vérifier que justice est bien rendue. Mais pas facile d'enquêter avec une détenue qui ne souhaite pas parler ... ou peu. Tant pis, le shérif se rend sous une couverture peu crédible sur les lieux du crime et fait la connaissance petit à petit de personnages singuliers, rustres et parfois attachants. L'enquête s'annonce très difficile et musclée.

Dark Horse est un pur délice pour tout amateur de bon polar. Il se lit bien et Craig Johnson a l'art et la manière de nous emporter dans son Amérique reculée où cohabitent des personnages en tout genre mais aussi des amérindiens.
Je me laisserai sûrement tenter par la série du même nom que le shérif ; Longmire, l'un d'entre vous l'a t-il déjà vu ?

dimanche 2 août 2015

Les vieilles peaux

Les vieilles peaux est un roman de Danièle Ohayon paru le 19 Juin aux éditions Lemieux.

Présentation de l'éditeur :
Premier opus d’une série intitulée « La Maison des Dames », ce polar d’idées aborde des sujets de société dérangeants comme le vieillissement et sa place dans la cité.
« Peu prisé des Parisiens qui partent en masse passer leurs week-ends à l’ouest de la capitale, le sud de l’Aisne, à une heure et quart de Paris, dévoile une beauté douce. C’est une modeste provinciale aux atouts discrets et sûrs, quels que soient les caprices du temps. Les chanceux qui l’ont découverte y restent attachés comme Thésée au fil d’Ariane. »
En quelques lignes, Danièle Ohayon campe son univers de fausse douceur, de lumière mouillée et de perversité. Autour de la Maison des Dames et du personnage central, la toubib humaniste Mars Catalano, se déploie une histoire vénéneuse où le théâtre des apparences perd délicieusement le lecteur. Des terres de l’Aisne à la banlieue parisienne sévit un serial-killer d’un nouveau genre : un tueur de personnes âgées. Où l’on voit aussi des activistes pro-seniors, les Indignés gris, un journaliste suspect, une fonctionnaire en burn-out, une étrange station de radio et même un médecin tchadien en exil.

Avec Les vieilles peaux, l'auteur rend hommage aux personnages âgées bien trop souvent oubliées par la société et gagatisées par de nombreux proches ou autres personnes s'en occupant. Danièle Ohayon insiste sur le fait que ces personnes catégorisées dans le troisième âge, lorsqu'elles ont encore toute leur tête, ont été comme nous ; des enfants d'abord, puis des adultes responsables avec une plus ou moins bonne situation. Dans ce roman, le regard du lecteur envers nos aînés change en même temps que l'enquête sur le tueur en série des personnes âgées avance.

Car Les vieilles peaux est avant tout un polar, et un plutôt bon polar d'ailleurs. Le suspense est au rendez-vous ! Mais en plus d'être un polar où sévit un meurtrier et dans lequel les rebondissements ne manquent pas, le roman de Danièle Ohayon pose des questions sincères sur la vieillesse et l'acceptation de la mort.

Les vieilles peaux nous embarque dans une histoire peu habituelle aux personnages attachants et chaleureux. Le roman nous secoue et, par le biais d'une belle plume, nous transporte dans le département de l'Aisne pour tenter de découvrir qui peut bien se cacher sous le masque mystérieux du seniors'killer. Un roman qui ne manque pas d'humour et de piquant !