lundi 29 juin 2009

L'orange mécanique

L'orange mécanique est un roman d'Anthony Burgess qui a permis à Stanley Kubrick d'en tirer un chef d'œuvre cinématographique : Orange Mécanique.

Présentation de l'éditeur :
Le décor inquiétant de cette fable anti-utopique, nous le connaissons bien : c'est celui de la banlieue concentrationnaire qui va recouvrir peu à peu la surface habitable de la planète. Une immense zone urbaine d'ennui, de désolation et de peur.
Sur ce monde déshumanisé et ses habitants asservis, Alex, le voyou au charme pervers féru de musique classique et de langues anciennes, entend régner par la violence et la terreur. À la tête de sa horde adolescente, il matraque, viole, brûle, torture, et s'acharne à détruire une société programmée pour le bonheur et le progrès.
Archange du Mal à l'état pur, il hante à jamais les pages cruelles de cet inoubliable thriller métaphysique.

L'orange mécanique présente un monde déshumanisé et légèrement futuriste où la banlieue ne cesse de s'accroître et où les langues s'entremêlent dans le but de créer un jargon riche et violent. Sorte de mélange de manouche et de russe, cet argot permet au récit d'être totalement décalé et rend la compréhension assez difficile. Notre "humble narrateur" se nomme Alex, il est le chef d'une bande de quatre jeunes, aussi appelés drougs. Alex est à la fois raffiné (voir son goût immodéré pour le classique) et tellement cruel, son titre d'"archange du mal" lui va à ravir. Il est tout et son contraire. Son côté maléfique le rend pervers et violent alors que son côté angélique fait de lui un homme de goût et de bonne compagnie. Il joue avec ce second côté pour faire ressortir adroitement le premier afin de pouvoir assouvir sa soif de cruauté. Alex est un véritable et dangereux prédateur. Il n'est pas effarant d'ailleurs de s'apercevoir qu'il est le maître des drougs car il est intellectuellement supérieur et très malin. Il a l'esprit d'un meneur. Le rythme nerveux de Beethoven berce le narrateur dans un monde merveilleux d'ultra-violence qu'il ne souhaite pas quitter.

Les différents indices concernant le temps s'entrechoquent pour finalement créer une époque intemporelle ; un langage proche des vieilles langues à une période proche de la nôtre (enfin celle de l'auteur à l'époque) mais légèrement différente, décalée dans le futur. Impossible donc d'identifier la période où se situe l'histoire. Le roman semble être découpé en trois parties distinctes : le lynchage (l'apogée du plaisir et de la violence), le traitement(tournant de l'histoire où Alex semble se perdre et ne contrôle plus l'univers alentour : "je n'ai plus eu de rêve") et la vengeance (les nerfs des victimes se lâchent et se retournent contre l'agresseur devenu totalement inoffensif). L'auteur semble vouloir dire que chaque coup se rend. Son roman paraît être une sorte d'exutoire puisqu'une part de lui-même s'y retrouve ("l'auteur de L'orange mécanique"). Il ne fait finalement pas l'apologie de la violence mais dénonce, non sans un certain talent, la colère et la bêtise humaine. L'histoire est réfléchie et l'auteur ne tombe jamais dans le piège de la violence gratuite. Toute dérive subit un jugement. Au final, Anthony Burgess pose la question suivante avec son roman : peut-on changer la nature humaine ? Et si oui, quelles sont les limites de ce changement ? Un excellent roman donc avec beaucoup d'originalité et créativité.

On avait les poches pleines de mouizka, si bien qu'on n'avait pas vraiment les moyens, histoire de craster encore un peu de joli lollypop, de toltchocker un vieux veck au fond d'une impasse et de le relucher baigner dans son sang tout en comptant la recette et la divisant par quatre, ni de faire des ultra-violents à une viokcha ptitsa, toute grisaille et tremblante dans sa boutique, pour vider le tiroir-caisse jusqu'aux tripes et filer en se bidonskant. Mais, comme on dit, l'argent n'est pas tout.

Note : 17/20

samedi 20 juin 2009

3 fois plus loin

3 fois plus loin est le nouveau roman de Jérôme Camut et Nathalie Hug, les auteurs de la terrible trilogie des Voies de l'ombre (Prédation, Stigmate, Instinct).

Présentation de l'éditeur :
Dans les années cinquante, quatre scientifiques français traversent la jungle vénézuélienne en quête d’une espèce de singe muets. Ce qu’ils vont découvrir va bouleverser le cours de leur vie. Amazonie, de nos jours : Nina Scott dirige une équipe de cueilleurs d’essences rares pour l’industrie américaine. Cette région réputée dangereuse est le terrain de chasse de braconniers sans scrupules et de trafiquants de drogue. Malgré les recommandations des guides qui les accompagnent, Nina s’éloigne de la zone de cueillette et fait une étrange découverte. Les vestiges d’un village abandonné, dans un site magnifique, où les singes sont silencieux et les arbres recouvrent des charniers. Alors que la mort frappe ses compagnons, elle est miraculeusement épargnée. Traumatisée et hantée par un passé quelle refuse d’affronter, Nina Scott refuse d’abandonner, malgré les menaces qui pèsent sur sa vie et celle de ses proches. Des mines d’émeraudes colombiennes aux bidonvilles de Caracas, des palaces de la côte d’Azur aux confins du désert marocain, Nina va alors se lancer dans une aventure qui pourrait mettre en péril sa vie et bien plus encore.

Les auteurs ont décidé de dévier légèrement de cap puisqu'à la place d'un habituel thriller démoniaque et terrifiant, ils ont tenté l'expérience du roman d'aventure. Léger thriller, cet ouvrage permet aux lecteurs de voyager de l'Amazonie jusqu'en France, tout en passant par les Etats-Unis et le désert marocain. J'avoue avoir eu peur en achetant ce livre car je pensais entrer totalement dans un roman parsemé d'explorations de grottes et autres jungles et ce genre a tendance à m'ennuyer. Finalement cette ambiance laisse vite place à la terreur et engendre une scène mémorable où l'un des personnages se retrouve aux prises d'inconnus totalement acharnés.

Ton paradis, c'est un cimetière, Nina, et ce chemin, des sépultures.

Le début est plutôt bon, voire même excitant puisque la jungle, ce mystérieux et vaste territoire, regorge de secrets et de lieux plus ou moins dangereux. Nous vivons, nous déplaçons et parcourons l'Amazonie sur les traces de Nina, farouche aventurière et fille d'un très célèbre auteur américain. Et c'est par la faute de ce père souvent absent que la jeune femme a décidé de s'éloigner le plus possible. Lasse des hôtels de luxe, elle a préféré s'engager pour ce voyage périlleux afin de cueillir des essences rares pour une grande firme pharmaceutique. Nina souffre atrocement du manque d'affection de son père, même si elle n'osera jamais l'avouer. Cette situation rend le personnage fort, courageux et tenace avec un léger caractère de cochon.

Nous ne sommes pas seuls !

L'histoire est divisée en deux parties qui finiront par se rejoindre ; deux personnages totalement différents à deux époques éloignées. Différents, pas tant que ça. En effet, outre le fait qu'il s'agisse de deux voyageurs assoiffés de découverte et de vérité, ces deux meneurs semblent perturbés par leur identité et leur vie de famille. Au delà, d'un simple roman d'aventure, 3 fois plus loin s'avère être une véritable quête sur l'identité et pose de nombreuses questions auxquelles chacun trouvera sa réponse. Malgré tout ce positif, j'ai trouvé que le roman souffrait de trop nombreuses longueurs. La tension peine à arriver et n'a pas réussi à m'absorber totalement.

Note : 14/20

jeudi 18 juin 2009

Le cinquième clandestin

Le cinquième clandestin est un roman de Marin Ledun et représente le quatrième opus de la collection Mona Cabriole des éditions La Tengo.

Présentation de la collection par l'éditeur (source) :
Mona Cabriole, journaliste pour le webzine Parisnews, est toujours à l’affût des désordres et des injustices de notre société. Elle traque le fait divers, et s’acharne à lui redonner du sens dans un monde qui en semble dépourvu. Chaque auteur met en scène l’héroïne dans un arrondissement de Paris et dispose d’une carte blanche pour introduire une dimension rock dans son ouvrage. La collection réunit ainsi 20 écrivains aux parcours artistiques éclectiques et par là même 20 styles d’écriture, 20 regards sur Paris, 20 rapports à la musique.

Présentation de Le cinquième clandestin par l'éditeur :
Paris, 100 rue Mouffetard : quand une jeune femme se jette du cinquième étage, un bébé dans les bras, personne n’a rien vu, tous se taisent. Tous, sauf Mona Cabriole. Pourquoi un tel geste de désespoir ? Et que cachent les sous-sols de cet immeuble géré par des marchands de sommeil ? La journaliste de Parisnews devra descendre dans les profondeurs de la ville et se baigner dans les eaux d’un fleuve oublié pour aller ausculter les limites de la soumission. Les hurlements qu’elle y entend sont-ils ceux des battles punk-rock organisés dans les soubassements, ou bien proviennent-ils de voix que l’on voudrait étouffer ?

Quatrième roman de la série Mona Cabriole (où sont attendus des personnalités comme Arthur H ou encore Antoine Chainas) et le lecteur est cette fois transporté dans le cinquième arrondissement de Paris ; un quartier dépaysant et animé où tout le monde semble être de mèche ("Tout le monde se connait et tout le monde ment."). Alors qui croire ? A qui la dynamique Mona peut-elle se fier pour son enquête ? Réveillée par un coup de fil de son patron, elle se voit attribuer la lourde tâche de couvrir un suicide pour son journal. Mais Mona est fouineuse et est capable de déceler une embrouille quand elle en voit une. Alors que cache le suicide d'une jeune africaine et de son bébé ?

Toi en haut, eux en bas, ironie du sort.

Entre double jeu, manipulation, chantage et dénonciation, le roman ne manque pas de piment et s'explore sur un rythme effrené à la manière des riffs d'un morceau de Punk. Le lecteur se plait à suivre la journaliste dans les rues du 5ème sur ses pas endiablés. Avec des scènes stressantes où l'on vit la séquence avec l'héroïne, l'enquête va la mener à découvrir de terrifiants secrets et à se poser de nouvelles questions sur le statut des immigrés. Quelle chance la France donne t-elle à ces personnes ? Quels choix ont-ils ? Comment survivre dans pays où le gouvernement ne veut pas d'eux ?

Clandestines en France, répudiées dans leur pays d'origine, et livrées aux ordures de tout pays pour payer la dette séculaire de la connerie humaine.

Avec un peu plus de 150 pages, Marin conçoit un roman court bourré d'énergie avec une Mona attachante et pétulante, le tout sur une musique monstrueusement délicieuse. Plus qu'un polar urbain, il s'agit ici d'un véritable brûlot social d'une France totalement incohérente. L'auteur utilise judicieusement le support littéraire afin de condamner les inégalités et les injustices, et décrit trois catégories de personnages : ceux qui se battent, ceux qui profitent et ceux qui se terrent derrière la peur.

No second chance, no guiding light. (NOFX)

Note : 18/20

dimanche 7 juin 2009

La ligne noire

La ligne noire est un roman de Jean-Christophe Grangé.

Présentation de l'éditeur :
Il existe, quelque part
en Asie du Sud-Est,
entre le tropique du Cancer
et la ligne de l'Équateur,
une autre ligne.
Une ligne noire jalonnée
de corps et d'effroi...


Marc Dupeyrat, après avoir été l'un des meilleurs paparazzi, est journaliste pour un modeste magazine spécialisé dans les faits divers. Après avoir flirté à deux reprises avec la mort dans le passé, Marc n'a plus qu'un but dans sa vie : comprendre l'origine du Mal. Comment naissent les tueurs en série ? Quel intérêt ou quelle sensation apporte le meurtre ? Il décide donc de s'intéresser au cas de Jacques Reverdi, tueur en série présumé détenu dans l'une des plus importantes prisons de Malaisie, afin de récupérer ses confidences qui permettraient à Marc d'écrire l'article tant recherché et d'obtenir les réponses à toutes ses questions. Ancien champion d'apnée, Jacques est accusé d'avoir commis plusieurs meurtres sordides sur des femmes. Et justement il n'y a que les femmes qui peuvent l'approcher. C'est pourquoi Marc invente le personnage d'Élisabeth grâce auquel il va pouvoir parcourir le même chemin que Reverdi en Asie; suivre la terrifiante ligne noire traçant son sanglant itinéraire.

Un tueur qui possédait, grâce à sa pratique spirituelle, un vrai regard sur sa névrose et pouvait donner à voir, comme en transparence, le visage du Crime.

Aux allures du célèbre Silence des agneaux de Thomas Harris, ce roman décrit, par le biais de correspondances entre Reverdi et Marc alias Élisabeth, le portrait d'un tueur en série réfléchi et manipulateur. En effet, sous une atmosphère à la fois douce et mortuaire, l'étrange sage-tueur manipule toute personne l'approchant physiquement ou mentalement. Mais Marc se veut intelligent et se montre assez astucieux pour tenter de feindre l'homme le plus redouté de Malaisie. Mais est-il préparé à affronter le Mal ? Car attention, il faut apprendre à maîtriser le feu avant de jouer avec.

Ce lien hypothétique entre le bleu profond et le noir extrême, ce parcours impossible entre le bien et le mal, me donne le vertige.

Grangé utilise un style parfait pour monter en pression et rendre l'ambiance régnante de plus en plus tendue. Par exemple, l'auteur arrive avec une simple description de café à accentuer la noirceur du roman et à rendre encore plus mystérieux cet étrange et énigmatique tueur en série. Il fait d'ailleurs de Jacques Reverdi l'un des pires meurtriers littéraires aux méthodes plus qu'originales. Marc, après avoir décidé de s'aventurer vers la "source de la ligne", remonte peu à peu sur les origines du côté sombre de Reverdi. Cette partie m'a rappelé, pour ceux qui connaissent, le film Strange Circus de Sono Sion (ne pas lire le synopsis du film si vous souhaitez lire le roman).

Cette feuille est ta peau, cette encre est mon sang

Mon second roman de Grangé et encore une jolie découverte malgré un seul point regrettable : la fin si évidente ... La musique classique semble être un point récurrent chez lui puisqu'il cite Bach, Chopin et encore d'autres dans La ligne noire et Miserere en est totalement immergé. Mélanger la douceur de la musique classique aux terrifiants meurtres donne une tension parfois insoutenable à ses récits. Cet auteur est apparemment une valeur sûre. Je ne manquerai pas de continuer à le lire.

Note : 17/20