Jésus et Tito est le nouveau roman de Velibor Colic. Septième roman mais également le second roman écrit directement en français.
Présentation de l'éditeur :
En 1970, dans la Yougoslavie de Tito, Velibor a six ans et veut devenir footballeur. Noir et Brésilien, de préférence.
« Relativement tôt, je me suis rendu compte que mes souvenirs, mon enfance, toute ma vie d’avant, appartenaient au Jurassic Park communiste, disparu et enterré avec l’idée de la Yougoslavie. » Velibor feuillette ses souvenirs : une enfance sous le signe de la bonne étoile — rouge — et une adolescence sous influence rock’n roll. On ne choisit pas toujours ses icônes : le petit Jésus contre le maréchal Tito est un match qui se joue tous les jours à la maison. Velibor navigue entre Jack London et Pelé, puis dans les années 80 entre les Clash et Bukowski. Son grand amour sera la littérature. Devenu grand, Velibor rêve d’être poète. Maudit, évidemment.
L'ouvrage est, d'après l'auteur, un mélange d'imagination et de mémoire. Tantôt sous forme de de bilan, tantôt assimilé à une longue confession, Jésus et Tito aborde sous deux regards différents la Yougoslavie de 1970 à 1985. Pourquoi deux regards ? Parce que derrière le côté autobiographique de sa vie de jeune yougoslave, on ressent l'ironie de l'auteur-adulte dans le même discours. On a affaire à un savoureux mélange entre la tristesse d'un adulte et la joie d'un enfant. L'un critique, voire même condamne, certains agissements tandis que l'autre les commet innocemment sans se rendre compte des conséquences.
Jésus, avec ses histoires, ça ne marche plus. L'enfer et le paradis, laisse tomber, quel baratin.
- Avec moi, me dit le Maréchal, arborant son sourire légendaire, c'est tous les jours Noël. Tu vois ...
Au matin, je me suis réveillé fatigué, mais communiste.
Dans un premier temps, Jésus et Tito est le récit d'un gamin totalement perdu parmi les différents peuples qui constituaient l'ex Yougoslavie. Vélibor enfant connaît un réel problème d'identité à la fois culturelle et religieuse. Vient ensuite la lente désillusion du socialisme yougoslave des yeux de cet enfant qui grandit et délaisse peu à peu ce Maréchal Tito. Ce dernier est longtemps considéré comme un héros. Plus connu et adulé que Jésus lui-même dans son pays.
Jésus et Tito relate l'histoire d'un gamin et de ses amis remplis d'espoir. Ils forment avec le reste de la population un peuple extrêmement fier de son régime politique. Mais en grandissant le pouvoir hypnotique du capitalisme attire ces gamins, qui ne rêvent que de s'ouvrir au monde, dans ses filets. Ils rêvent de rock américain, de football international, de gadgets, d'habits punk ... et c'est lorsque vient le temps de l'armée que Vélibor, jeune adulte, prend conscience de la bêtise humaine.
Je veux être poète, et maudit si possible.
Véritable critique sous forme autobiographique, Jésus et Tito est un excellent récit dont le titre lui-même offre un conflit. Sous le biais de choses simples (comme une photo dans un porte-feuille), l'auteur démontre à quel point les ex-yougoslaves vénéraient leur chef d'état. Le conflit des religions, des idées et des cultures annoncent petit à petit une tension grandissante entre les peuples.
Vélibor Colic offre une vision intéressante et assez nouvelle de la Yougoslavie en s'arrêtant finalement juste avant le début de la guerre des Balkans. L'auteur utilise un style très riche et rend son récit bien plus intéressant qu'il n'y parait. Il fait preuve d'une intelligence rare dans la littérature contemporaine en combinant à la perfection humour et force narrative. Un excellent roman donc qui restera longtemps comme une référence à mes yeux.
Relativement tôt, à vingt-huit ans, je me suis rendu compte que tous mes souvenirs, mon enfance, toute ma vie d'avant, appartenaient au Jurassic Park communiste, disparu et enterré en même temps que l'idée de la Yougoslavie, pays des Slaves du Sud.
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