jeudi 7 mai 2009

Shutter Island

Shutter Island est un roman de Dennis Lehane, auteur réputé dans le monde du polar et dont certains de ses romans ont été adaptés au cinéma : Gone Baby Gone et Mystic River. Ce roman fera lui aussi l'objet d'une adaptation cinématographique par le grand Martin Scorsese.

Présentation de l'éditeur :
Nous sommes dans les années cinquante. Au large de Boston, sur un îlot nommé "Shutter Island" se dresse un groupe de bâtiments à l’allure sinistre. C’est un hôpital psychiatrique dont les patients, tous gravement atteints, ont commis des meurtres. Lorsque le ferry assurant la liaison avec le continent aborde ce jour-là, deux hommes en descendent : le marshal Teddy Daniels et son coéquipier Chuck Aule. Ils sont venus à la demande des autorités de la prison-hôpital car l’une des patientes, Rachel Solando, manque à l’appel. Comment a-t-elle pu sortir d’une cellule fermée à clé de l’extérieur ? Le seul indice retrouvé dans la pièce est une feuille de papier sur laquelle on peut lire une suite de chiffres et de lettres sans signification apparente. Oeuvre incohérente d’une malade ou cryptogramme ? Au fur et à mesure que le temps passe, les deux policiers s’enfoncent dans un monde de plus en plus opaque et angoissant, jusqu’au choc final de la vérité. Avec Shutter Island, Dennis Lehane est au sommet de son art.

Teddy Daniels et Chuck Aule s'apprêtent à faire escale sur Shutter Island, terrifiante île où se situe l'établissement (mi hôpital psychiatrique - mi prison) qui accueille les personnes les plus violentes et les plus dérangées mentalement. Une tempête se prépare et les deux marshals vont sans doute devoir rester plus longtemps que prévu sur cet étrange site. Dès le début du roman, une ambiance brumeuse et une tension quelque peu électrique s'installent affichant tout de suite la couleur au lecteur. Le roman sera noir, horriblement sombre, et il faudra user de patience et de ruse pour s'en sortir.

Et au beau milieu, flanqué de deux ailes coloniales identiques, se dressait l'hôpital lui-même, un édifice mêlant la pierre couleur anthracite à l'élégance du granit.

Sur un climat d'après guerre, les deux marshals enquêtent sur la disparition mystérieuse d'une des patientes. Rachel Solando a réussi à s'évader de sa cellule fermée à clé et surveillée par un gardien. En plus de ce tour de passe-passe, elle a traversé des salles remplies d'aides-soignants, gardiens et d'infirmiers. Est-elle magicienne ? A t-elle bénéficié de l'aide d'un complice ? Ou l'établissement est-il si mal surveillé ? Quand bien même elle serait sortie du bâtiment, où est-elle passée ? Il est impossible de quitter l'île à la nage et des recherches ont été effectués dans les moindres recoins. Et lorsqu'ils commencent à trouver des signes de vie, des codes laissées par la patiente, d'autres interrogations aparaissent. Qui est le patient 67 qu'elle mentionne ? Autant de questions que se posent les deux flics qui prennent vite conscience que quelque chose ne tourne pas très rond dans cette clinique.

la Lune est capable de bousculer l'océan, imaginez ce qu'elle peut remuer dans la tête

L'île peut être interprétée comme le symbole du cerveau humain. Entourée d'eau comme le cerveau est enveloppé dans le liquide cérébro-spinal, elle abrite une prison dont on ne peut guère s'en évader facilement. L'incarcération physique sur l'île peut aussi être représentée par l'enfermement d'une personne dans ses pensées, sa propre réalité, voire même une sorte de schizophrénie ou autre maladie psychiatrique. Au final, l'île orageuse et son l'hôpital psychiatrique décrits par l'auteur seraient-ils la métaphore d'un cerveau malade ?

la violence de sa propre destruction crée un autre monstre entièrement nouveau

On peut remarquer beaucoup de disparitions présentes tout au long du roman ; le passé qui se volatilise, l'ex-femme de Teddy, la patiente et quelques autres. Ce huis clos efficace est hanté par une sorte de nostalgie et de divers regrets ("Tout a disparu, maintenant."). Avec une tension qui s'accentue au fil des pages, l'auteur joue avec nos nerfs et s'amuse à nous perdre dans son histoire. Le lecteur se sent perdu, troublé ("Oubliez ce que vous avez entendu. Oubliez ce que vous croyez savoir."). Dennis Lehane ausculte, examine et explore au plus profond de ses personnages. Aussi, le lecteur s'aperçoit qu'on le teste, le sonde et l'observe sans cesse. Quelle est selon vous la version des faits ? Que se cache t-il derrière tous ces codes ? Qui est qui ?

Tout se réduit à cette seule question : ma violence est-elle capable de l'emporter sur la vôtre ?

L'auteur glisse depuis le début de son roman des indices mais on ne s'y attarde pas. Il est astucieux, très malin et fait de son ouvrage un véritable tour de magie, de la même manière que la patiente a réussi à s'évader. Ce roman noir est une pièce de collection inévitable pour votre bibliothèque. J'espère que le film sera à la hauteur du chef d'œuvre de Dennis Lehane.

Note : 19/20

2 commentaires:

Ys a dit…

Bonjour,
Ce livre fait partie des meilleurs que j'ai lus dans ma vie, et même relus. Tout est maîtrisé, l'ambiance, les personnages et surtout cette intrigue incroyable qui fait douter à la fin et sépare les lecteurs en deux clans irréconciliables : ceux qui pensent que... et ceux qui pensent que... J'attends aussi beaucoup du film, trop sûrement... As-tu lu la BD de Christian de Metter adaptée de ce roman ?

MiKa ... a dit…

Bonjour, merci pour ton commentaire. En effet, Shutter Island est excellent sur tous les points et la fin est vraiment ... surprenante !
On m'a offert la BD il n'y a pas longtemps, je devrais bientôt la lire.